TÉMOIGNAGE – Alzheimer, foutue maladie

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Quelle fille n’a pas pleuré toutes les larmes de son corps devant le film Les Pages de notre amour (The Notebook) ? Personnellement, j’en avais le col mouillé !

Ce film est encore plus significatif lorsqu’au même moment, tu apprends que ta grand-maman est atteinte de cette foutue maladie qu’est l’Alzheimer et que ton grand-papa décide de la garder à la maison et d’en prendre soin, contre vents et marrées…

Au début du mois de janvier, Le Journal de Montréal a publié une série de reportages sur l’Alzheimer. Comme trois Canadiens sur quatre connaissent au moins une personne atteinte de cette maladie cognitive et qu’il n’existe encore aucun remède ni traitement efficace, ce sujet est toujours très prisé chez les lecteurs.

Ayant reçu de nombreux témoignages, celui de M. Gaston St-André a retenu notre attention. Ce dernier s’occupe seul de sa femme atteinte de l’Alzheimer depuis plus de 20 ans. Je suis donc allée le rencontrer, afin de parler de son expérience, et je dois vous avouer que cette rencontre m’a mise tout à l’envers.

Ce pauvre homme avait promis à sa femme de la garder avec lui pour toujours, mais ses deux crises de cœur et son opération à la hanche l’ont obligé à briser sa parole. Il se fait toutefois un devoir de visiter tous les jours sa femme, depuis qu’il l’a placé.

Au fil de son récit, si beau et si triste à la fois, je ne pouvais m’empêcher de penser à grand-papa Jacques, qui a lui aussi laissé sa santé… et sa vie… pour prendre soin de SA Laurette.


Perdre ses repères

Difficile de dire quand tout a commencé, mais disons qu’on a eu la confirmation que l’Alzheimer s’était emparé de mamie Laurette lors de son 50e anniversaire de mariage. Elle avait des « fuites » depuis quelques mois, mais lorsqu’elle a donné un discours complètement décousu durant la cérémonie, nous n’avons eu d’autres choix que de se rendre à l’évidence.

Grand-papa Jacques s’est donc retroussé les manches et a repris son rôle de père, car plus la maladie avance, plus la personne atteinte semble retomber en enfance. Il faisait le ménage, le lavage, la cuisine, les courses, il s’assurait que grand-maman prenne ses médicaments, il la lavait, l’habillait et la peignait. Bref, comme on fait avec un enfant de 2 ans.

Et plus le temps avançait, moins elle le reconnaissait. Les dernières années, elle l’appelait tout simplement « l’autre ». Malgré tout, grand’pa se montrait patient et compréhensif. Je vous dis qu’il l’aimait sa Laurette.


Quelques anecdotes

Comme tous bons Québécois, mes grands-parents avaient une maison mobile dans un parc de roulottes en Floride, à Naples. Une année, ma cousine décide d’aller leur rendre visite et part à la piscine avec grand-papa, par un après-midi chaud.

Sur place, des petites madames en maillot de bain étaient allongées au soleil, alors ma cousine dit à mon grand-père en le taquinant : « Tu vas pouvoir te rincer l’œil! » Et lui de répondre : « Pourquoi se contenter du baloney quand tu as du bon jambon à la maison? »

C’était sa façon à lui de faire des compliments.

Une autre anecdote : lors d’un souper de famille, en plein milieu du repas, ma grand-mère lève les yeux vers mon grand-père et l’appelle par son nom. Autour de la table, on aurait entendu une mouche voler, puisque ça faisait belle lurette qu’elle ne l’avait pas reconnu.

Elle lui demande alors s’ils peuvent retourner à la maison ensemble. Sans attendre une seule seconde, grand-papa Jacques ramasse ses affaires et embarque grand-maman dans l’auto, espérant passer ce petit moment de lucidité avec sa femme.

Malheureusement pour lui, une fois rendue à la maison, la maladie avait repris le dessus et elle ne le reconnaissait plus


Les aidants naturels

La tâche est lourde pour les aidants naturels. Considérant qu’un proche aidant sur quatre est lui-même un aîné, plusieurs y laissent leur santé physique et mentale.

C’est d’ailleurs ce qui est arrivé à grand-papa Jacques. Après avoir surmonté deux cancers (du côlon et du foie), il a finalement succombé à une crise de cœur, le 30 décembre 2007. Le stress de cette tâche ardue a probablement été l’élément déclencheur.

Grand-maman Laurette a ensuite été placée dans un foyer et est finalement décédée en février 2010, à un stade très avancé de la maladie. D’ailleurs, à ce jour, on est toujours incertain de la cause, mais n’ayant plus le réflexe d’avaler, elle ne mangeait/buvait pratiquement plus et perdait du poids à vue d’œil.


Et moi…

En écrivant ces lignes, je ne peux que me demander si mon futur mari en ferait autant… Non pas que je doute de son amour et de sa bonne volonté, mais j’ai l’impression que les hommes modernes sont beaucoup moins dévoués qu’il y a 50 ans.

Bref, comme il s’agit d’une maladie héréditaire, je suis peut-être porteuse du « gène » et je souhaite de tout cœur que la médecine ait trouvé un remède ou un traitement à cette maudite maladie avant que j’atteigne l’âge critique de 65 ans.