Qu’on le veuille ou non, qu’on porte ou pas le titre de Grincheux d’une quelconque célébration annuelle, qu’on soit seule ou en famille, qu’on vienne d’ici ou d’ailleurs…
ON A TOUS DES TRADITIONS!
Par définition, une tradition dans son sens absolu est une mémoire et un projet, une conscience collective: le souvenir de ce qui a été, avec le devoir de le transmettre et de l’enrichir. Avec l’article indéfini, une tradition peut désigner un mouvement religieux par ce qui l’anime, ou plus couramment, une pratique symbolique particulière, comme les traditions populaires.
Récemment, certains événements m’ont amené à me questionner sur l’importance des traditions pour chacun et, surtout, sur l’importance de les perpétuer pour le bien-être de tous.
Quelques-unes de nos traditions
J’ai été élevée dans les traditions québécoises et je remercie aujourd’hui (feu!) mes parents et mes aïeux, qui les ont maintenues au fil du temps. Chaque génération y a apporté sa couleur, son sens, mais leur essence est demeurée la même!
Des fêtes chrétiennes imposées par le clergé fondateur d’Europe, en passant par nos mets typiques (tourtière, sirop d’érable, canneberges…) créés par les Amérindiens, et nos soirées musicales festives fortement inspirées des Irlandais qui nous gardaient le coeur chaud en hiver: notre Québec se souvient et se transforme.
Dans ma famille, les Fêtes religieuses ont toujours été célébrées et le sont encore. On les prépare et on se rassemble encore avec ceux et celles qui le désirent et le peuvent.
Jeune, je chantais dans la chorale de l’église et on allait aux grandes messes. C’était comme si on arrêtait le temps pour prendre davantage conscience de la chance que nous avions d’être ensemble, heureux, en paix, et nés égaux!
J’ai amené mes filles à la traditionnelle messe de minuit de l’Oratoire Saint-Joseph, il y a quelques années. Je voulais leur faire vivre l’expérience magistrale d’une messe en latin chantée par les petits et les grands chanteurs du Mont-Royal. Elles n’ont pas du tout aimé l’expérience et se sont endormies au bout de 30 minutes. Elles se souviennent, par contre, du bon goût du chocolat chaud aux guimauves que nous avons dégusté en admirant la ville de Montréal illuminée au sortir de la messe.
Mes filles n’ont pas voulu perpétuer cette tradition. Je ne comprends pas pourquoi… 😉
Le Jour de l’An demeure un moment fort dans ma famille, celle de mon père en particulier. C’est l’aîné de la famille qui donne la bénédiction et souhaite à tous « Santé, Joie, Succès, et Paix ». Nous avons longtemps célébré la Nouvelle Année le 1er janvier, mais depuis quelques années, nous nous réunissons en janvier, après la fête des Rois, pour permettre à plus de gens d’être présents.
Saviez-vous qu’autrefois, les hommes d’un village passaient de maison en maison pour collectionner des dons pour les pauvres du village? Ils récoltaient surtout des produits naturels (des produits de la ferme). Cette tradition, qui avait lieu le 31 décembre s’appelait « la guignolée », c’est pourquoi les hommes ont pris le nom de « guignoleux ». Pour annoncer l’arrivée des « guignoleux », les enfants du village les précédaient en faisant du bruit avec des bâtons. Aujourd’hui, la Guignolée a lieu en décembre.
Puis, il y a ces autres petites traditions qui font mon bonheur et celui de mes proches, comme les cartes de souhaits, les cadeaux faits main, le bas de Noël érotique (!), le baluchon de jeux et de lecture avant un départ en voyage, le dodo sous la tente dans le salon la veille de Pâques, la café alcoolisé de ma mère le jour de mon anniversaire, les pyjamas du temps des Fêtes, les contes et légendes, la sortie annuelle aux pommes ou à l’érablière…
Je n’ose pas imaginer le jour où elles prendront fin, car j’aurai la nette impression qu’une partie de moi mourra!
Pour savoir où l’on va, il faut savoir d’où l’on vient. C’est, pour moi, la véritable signification des traditions !
L’importance de nos origines
Dans son écrit Rendez à ces arbres ce qui appartient à ces arbres, Boucar Diouf s’exprime ainsi :
Je ne plante pas cet arbre pour moi, je le plante pour les générations qui continueront à vivre sur cette terre dans cent ans. Les arbres qui nous nourrissent aujourd’hui n’ont-ils pas été plantés par nos ancêtres? Maintenant que nous avons bénéficié de la générosité de ceux qui nous ont précédés, nous devons faire la même chose pour les prochaines générations.
Je partage en totalité son point de vue et je ne suis pas la seule. Plusieurs généalogistes, historiens et chercheurs de renom le partagent et surtout, le prouvent.
Les traditions ont une valeur pour notre vie, parce qu’elles la rythment et que cela aide à construire notre identité. Les traditions familiales nous donnent le sentiment d’appartenance à une famille, et donc, une sécurité. Fortement chargées d’émotions, ces traditions jalonnent notre vie.
Malheureusement, elles se perdent de plus en plus… Notre société se caractérise par de l’instabilité (déménagements fréquents, foyers brisés, familles dispersées). Tout cela affecte notre stabilité émotionnelle. Il est donc important que nous comprenions que ces traditions vécues avec conviction vont donner aux enfants des souvenirs heureux, des valeurs spirituelles et des points de repère. Elles les aident à avoir des relations positives, non seulement avec les membres de leur famille, mais aussi avec leurs amis
La répétition des traditions et l’explication de leur signification vont structurer notre vie de façon positive, nous laissant des souvenirs marquants!
Le respect de nos ancêtres
En 2017, mes deux parents sont décédés à deux mois d’intervalle. Ma fratrie et moi étions préparés au décès de mon père, puisqu’il était atteint d’une grave maladie depuis 10 ans. En ce qui concerne ma mère, cela nous a tous pris par surprise, car elle nous cachait son véritable état de santé. De plus, dans les dernières années, nous n’avions presque plus de contacts, elle et moi. Plusieurs différends irréconciliables.
J’ai appris son décès de la bouche de ma cousine, une semaine plus tard. Ma fratrie m’a tenue à l’écart de ces derniers moments de vie, prétextant que c’était ses dernières volontés. Pourtant, on m’a rapporté que ma mère m’avait demandé à son chevet et croyait me reconnaître lorsqu’elle recevait certaines visites. Je ne suis pas surprise, car l’amour d’une mère pour ses enfants, peu importe les perceptions qui diffèrent, est toujours le même. Je n’en ai jamais douté.
Ma fratrie a pris des décisions qui allaient en l’encontre des traditions familiales, celles que ma mère chérissait tant et, pour ajouter au comble, mon frère et ma soeur n’ont pas permis à la famille de lui rendre un dernier hommage. Aucunes funérailles.
Ce geste irrespectueux a grandement peiné les gens. Je ne suis pas de ceux et celles qui entretiennent des sentiments de colère et de peine, alors j’ai cheminé pour en arriver à comprendre qu’ils s’infligeaient une souffrance plus grande que la mienne en agissant ainsi, et en demeurant dans leur vérité.
Si les traditions d’entraide, de communication, d’accompagnement et de deuils de nos ancêtres avaient été respectées, je demeure convaincue que l’impact dans la vie actuelle des membres de notre famille serait davantage positif. Aujourd’hui, l’union familiale n’est plus…
Et comme le disait si bien le Babine de Fred Pellerin, que ma mère aimait tant et qui chérit tant de traditions :
Moi, bien évidemment, je n’ai pas connu ça. Mais reste que oui, ce fut. Puis pour moi, même si je n’ai pas connu, le fait de savoir que ce fut, c’est bien en masse. Les témoignages l’assurent, leur assurance en témoigne.
Ainsi, en ce début d’année, je vous souhaite à toutes d’heureuses traditions pour la prospérité d’une meilleure mémoire collective !